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21896-1919 : La (re)naissance de l’olympisme

Pierre de Coubertin est à l’origine de la renaissance des Jeux Olympiques antiques et de la création du Comité international olympique (CIO), fondé le 23 juin 1894. L’objectif du CIO est de promouvoir l’éducation physique de la jeunesse et un universalisme sportif au service de la paix. Le choix originel de l’amateurisme traduit l’élitisme d’une aristocratie à l’origine du projet, et limite la participation des athlètes issus des classes populaires.

Les premiers Jeux Olympiques organisés à Athènes en 1896 suscitent l’engouement d’un public nombreux. Ce succès est favorisé par l’implication de la famille royale grecque, qui entend affirmer la place de la Grèce sur la scène européenne. Les trois éditions suivantes à Paris (1900), puis outre-Atlantique à St. Louis (1904) et, enfin, à Londres (1908), sont diluées dans le programme de grandes expositions universelles ou internationales. Malgré cette confusion, les comités d’organisation successifs posent peu à peu les jalons d’un projet olympique universaliste, qui exclut les femmes, puis limite leur participation à certaines épreuves. En 1912, les premiers Jeux véritablement autonomes se tiennent à Stockholm, en Suède. Des délégations venues des cinq continents y participent.

Le déclenchement de la Première Guerre mondiale provoque l’annulation des Jeux de 1916 prévus à Berlin. Le rêve d’une compétition capable de dépasser les conflits semble alors s’effondrer. 

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Elément graphique : piste de sport
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Element graphique : Athènes 1896

Les premiers jeux

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Spyridon Louis en costume traditionnel.
Spyridon Louis en costume traditionnel. Il devient le premier champion olympique du marathon lors des Jeux olympiques d’Athènes en 1896.
© Docpix

L’accueil des premiers Jeux modernes est perçu par la couronne grecque comme une opportunité exceptionnelle d’affirmation nationale. Le 6 avril 1896, le roi George Ier lance la compétition dans l’antique stade panathénaïque rénové pour l’occasion. 241 concurrents issus de quatorze nations, uniquement des hommes, s’affrontent dans 43 épreuves. Le coût du trajet et l’absence de comités olympiques nationaux entraînent une faible participation d’athlètes non grecs. Seuls les sportifs hongrois obtiennent de leur gouvernement le financement du voyage. Parmi eux, le jeune Alfréd Hajós remporte deux titres olympiques lors des épreuves de natation organisées en pleine mer Égée. Certaines tensions politiques se révèlent sur le terrain sportif, à l’image de la rivalité des gymnastes français et allemands. 

Spyrídon Loúis (1873-1940), héros du marathon 
Le 10 avril 1896, le berger grec Spyrídon Loúis remporte la course dite « de Marathon ». L’épreuve, imaginée par le linguiste Michel Bréal, ravive la légende du parcours du messager Philippidès entre Marathon et Athènes au Ve siècle av. J.-C. La victoire sert aussi l’ambition de reconnaissance internationale de la jeune nation grecque, indépendante depuis 1830. Au moment de recevoir sa récompense, Spyrídon Loúis porte une fustanelle, jupon traditionnel marqueur de l’identité nationale. 

Histoire, chiffres clés, résultats, athlètes remarqués… En savoir plus sur l’olympiade

Site internet de la Casden : Histoire, sport & citoyennetés : des jeux olympiques d’Athènes 1896 aux jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 :
https://casdenhistoiresport.fr/exposition/olympiades/periode-1896-1916#1896 
 

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Elément graphique : Paris 1900

Les Jeux Olympiques à l’heure de la modernité technique et industrielle

Dès 1894, les artisans de la renaissance olympique ont imaginé la deuxième édition des Jeux à Paris, dans le cadre de l’Exposition universelle de 1900. Cet événement spectaculaire érige, durant six mois, la capitale en phare de la modernité technique et artistique du monde. Il attire 50 millions de visiteurs, garantissant un succès populaire aux Olympiades. Cependant, le modèle élitiste coubertinien du sportsman amateur fortuné se heurte aux idéaux républicains d’Alfred Picard, commissaire général de l’Exposition. Ce dernier choisit d’écarter le CIO du comité d’organisation, et favorise la tenue de « concours internationaux d’exercices physiques de sports » populaires et patriotiques. Les nombreuses épreuves, parfois cocasses, sont dispersées dans l’espace et le temps, et rassemblent près de 60 000 participants. 

Sports insolites
Les Jeux Olympiques de 1900 mettent en scène de nombreux sports que l’on trouve aujourd’hui insolites, tels le tir à la corde, la pêche à la ligne ou le tir aux pigeons vivants. Certaines épreuves ravivent des pratiques anciennes. D’autres s’inscrivent dans la modernité et ravissent un public en quête de sensationnalisme. Des concours de ballons dirigeables sont ainsi organisés : celui de distance conduit le vainqueur jusqu’à Kiev, tandis que celui d’altitude met les participants en danger.
 

Constantin Henriquez, champion olympique haïtien et français
En octobre 1900, deux victoires contre l’Allemagne et l’Angleterre permettent à l’équipe de France de rugby d’être sacrée championne olympique. Constantin Henriquez, étudiant en médecine haïtien arrivé à Paris en 1893, devient le premier médaillé afro-antillais. La présence en équipe de France de ce joueur du Stade Français est rendue possible par l’absence de réglementation sur la nationalité des athlètes. De retour à Haïti, Constantin Henriquez devient, en 1906, le premier président du comité olympique du pays. 

En savoir plus sur Constantin Henriquez

Les premières olympiennes
Une quarantaine de femmes seulement participent aux Jeux lors des épreuves, exclusivement féminines, de tennis, voile, croquet, équitation et golf. Le 11 juillet 1900, la joueuse de tennis britannique Charlotte Cooper devient la première championne olympique. Cette féminisation naissante reste limitée et suscite toujours des réticences. Les affiches de promotion des concours d’escrime sont trompeuses, car la discipline, comme bien d’autres, demeure exclusivement masculine.

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Elément graphique : Saint Louis 1904

Une olympiade américaine

Afin d’affirmer la dimension internationale des Jeux Olympiques, le CIO souhaite organiser la troisième édition de la compétition outre outre-Atlantique. La ville de St. Louis est retenue contre la volonté de Pierre de Coubertin, et intègre à nouveau l’événement dans le programme d’une exposition universelle. Cette édition enregistre la plus faible participation d’athlètes de l’histoire. L’absence de nombreuses délégations, incapables de financer le voyage, favorise la large victoire des États-Unis et l’éveil d’une conscience sportive nationale. Les Jeux de St. Louis confortent également la société blanche étatsunienne dans une conception racialiste et hiérarchisée du monde, en particulier à cause de l’organisation de « journées anthropologiques » faisant s’affronter de prétendus « sauvages » dans des épreuves sportives. 

Les journées anthropologiques 
Les journées anthropologiques visent à démontrer la supériorité de la « race blanche » sur les soi-disant « peuples sauvages ». Sans entraînement pour des épreuves dont ils ignorent les règles, les « indigènes » exhibés dans le cadre de l’Exposition universelle établissent de faibles performances. Le jeune Pygmée Mbuti Ota Benga (en savoir plus), kidnappé en 1904 au Congo, est l’un d’eux. Il est à nouveau exhibé au zoo de New York après les Jeux en 1906, puis il se suicide quand il perd tout espoir de retour en Afrique.
 

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Jessie Tarbox Beals. Lancer de javelot lors des Jeux anthropologiques : un concurrent igorot (Philippines). 1904
Jessie Tarbox Beals. Lancer de javelot lors des Jeux anthropologiques : un concurrent igorot (Philippines). 1904
© St. Louis Public Library
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Le gymnaste unijambiste Georges Eyser (États-Unis, au centre), premier athlète en situation de handicap de l’histoire des Jeux
Le gymnaste unijambiste Georges Eyser (États-Unis, au centre), premier athlète en situation de handicap de l’histoire des Jeux. Photographié par Louis Melsheimer, 1904. Reproduction photographique
© Missouri Historical Society

Albert Corey et George Eyser, immigrés aux États-Unis
Le Français Albert Corey et l’Allemand George Eyser ont émigré aux États-Unis comme des millions d’autres Européens. Bien qu’arrivé tout récemment, Albert Corey, originaire de Franche-Comté, remporte la médaille d’argent au marathon sous la nationalité étatsunienne. La « restitution » de sa médaille au bénéfice de la France n’interviendra qu’en 2021. George Eyser, amputé d’une jambe après avoir percuté un train, concourt avec les valides, et gagne six médailles en gymnastique dont trois en or. 
 

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Elément graphique : Londres 1908

Les Jeux au service de l’Entente cordiale

En 1906, l’éruption du Vésuve plonge l’Italie dans une grave crise économique. Originellement attribuée à Rome, l’organisation des Jeux de 1908 est finalement confiée à Londres. La compétition est intégrée à l’Exposition franco-britannique qui célèbre avec faste l’Entente cordiale entre les deux pays. La British Olympics Association imagine une édition moins dispersée que les précédentes. Le White City Stadium construit pour l’occasion accueille le premier défilé des nations. Lors de la journée d’ouverture y sont aussi présentées des démonstrations sportives, dont un match de polo-vélo. Alors que le mouvement suffragiste en faveur du droit de vote des femmes mobilise les foules au cœur de Londres, la participation féminine reste cantonnée aux seules épreuves de patinage, tennis, voile et tir à l’arc.

Les premiers champions africain et africain-américain
En 1908, les colonies britanniques d’Afrique du Sud participent pour la première fois aux Jeux Olympiques. La délégation ne compte aucun athlète noir ou métis. En remportant l’épreuve du 100 mètres, Reggie Walker est le premier champion olympique issu du continent africain. Trois jours plus tard, l’équipe étatsunienne gagne le relais olympique avec, en son sein, John Taylor (en savoir plus), premier sportif africain-américain à représenter les États-Unis dans une compétition internationale. 

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Londres 1908. John Taylor (États-Unis) et ses coéquipier du relais olympique Nate Cartmell, Mel Sheppard et William F.Hamilton
Londres 1908. John Taylor (États-Unis) et ses coéquipier du relais olympique Nate Cartmell, Mel Sheppard et William F.Hamilton. Juillet 1908
© Collection University Archives of Pennsylvania

Dorando Pietri, un marathon royal    
À la demande de la famille royale, le départ du marathon est donné devant le château de Windsor, fixant ainsi à 42,195 km la distance du parcours, inchangée depuis. Le public, peu présent sur l’ensemble de la compétition, est estimé ce jour-là à 2 millions de spectateurs. En tête à l’issue de la course, l’Italien Dorando Pietri est à bout de force, et doit bénéficier d’une aide extérieure pour passer la ligne d’arrivée. Il est disqualifié, mais en compensation, il reçoit une coupe en argent des mains de la reine.

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Elément graphique : Stockholm 1912

Un modèle d’organisation

Pour la première fois depuis 1896, les Jeux Olympiques ne sont pas rattachés à une exposition internationale. Ils sont organisés de manière autonome, sur une période plus courte qu’auparavant, entre le 6 et le 22 juillet 1912. La Suède, pays du théoricien de la gymnastique Pehr Henrik Ling, « nation sportive » aux avant-postes de la diffusion des sports modernes, apparaît au CIO comme l’hôte idéal. Le roi Gustave V, sportif passionné de tennis, récompense lui-même les athlètes victorieux. Deuxième en nombre de titres remportés, la Suède termine première en nombre de médailles, devançant les États-Unis. Ce duel Europe-Amérique accroît l’intérêt de l’événement dans un contexte international marqué par des tensions qui font craindre un embrasement généralisé. 

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Stockholm 1912. Délégation japonaise.
Stockholm 1912. Délégation japonaise. Pour la première fois, les cinq continents sont représentés aux Jeux Olympiques.
© Docpix

Les premiers Jeux des cinq continents
À Stockholm, l’universalisation des Jeux progresse. Pour la première fois, les cinq continents sont représentés. L’Égypte, l’Islande, le Luxembourg, le Portugal, la Serbie et le Japon apparaissent dans l’arène olympique. Les athlètes extra-européens brillent dans les épreuves de natation, qui admettent désormais les femmes. Les épreuves du 100 mètres nage libre sont remportées par l’Australienne Fanny Durack, et par le surfeur hawaïen Duke Kahanamoku, qui utilise la technique peu connue du crawl. 

Jim Thorpe, un Amérindien au cœur des Jeux 
Athlète aux capacités prodigieuses, Jim Thorpe devient en 1912 champion olympique de décathlon et de pentathlon. Son sacre, célébré par toute la nation étatsunienne, survient douze ans avant que la citoyenneté soit accordée aux populations « natives » américaines dont il est issu. L’année suivante, le CIO lui retire ses titres, car il aurait transgressé les règles de l’amateurisme en participant à des matchs de baseball contre de l’argent. Cette sanction, jugée raciste, ne sera levée qu’en 1983. 

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Elément graphique : Berlin 1916

Les Jeux annulés

En 1912, l’organisation des sixièmes Jeux Olympiques est attribuée à Berlin. Ce choix vise à permettre la tenue d’un rassemblement pacifique, afin d’empêcher la guerre dans un contexte d’exacerbation nationaliste en Europe. Il vise également à transformer la culture sportive du pays, dominée par la gymnastique et éloignée du modèle compétitif anglo-saxon. En Allemagne, ces Jeux sont surtout perçus comme une opportunité de démontrer la puissance de l’Empire. Le Deutsches Stadion en est le symbole. Mais la Grande Guerre commence le 31 juillet 1914, et les Jeux Olympiques sont annulés en 1915. C’est alors que, face au risque d’une progression allemande jusqu’à Paris, Pierre de Coubertin transfère le siège du CIO à Lausanne pour bénéficier de la neutralité de la Suisse. 

Au sport comme à la guerre
Dans la presse sportive, la guerre est comparée à un « grand match ». La mort dès le début du conflit du champion français Jean Bouin, médaillé d’argent sur le 5 000 mètres en 1912, renforce l’image de sportifs valeureux et héroïques. Le sport est intégré à la préparation militaire. Des pratiques, comme le lancer de grenade, sont promues, mais sans grand succès. Les soldats qui sont sur le front préfèrent jouer notamment au football afin d’échapper à la discipline militaire et à l’horreur de la guerre. 

Les Jeux interalliés de 1919 à Paris 
Après la Première Guerre mondiale, pour fêter la victoire et sceller leurs liens, les Alliés organisent à Paris en 1919, à l’initiative des États-Unis, les Jeux interalliés, ouverts aux seuls militaires. Ils se déroulent au nouveau stade Pershing, construit en l’honneur du général qui commandait le corps expéditionnaire américain. Dix-huit nations participent aux épreuves d’athlétisme, de natation, de boxe, de lutte, de tennis, de rugby à XV, d’équitation, de tir, de baseball et de basketball. 

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Elément graphique : piste de sport